Au cœur du Saloum, parmi les contrées reculées des îles du Gandoul, Thiallane, petit village de pêcheurs, regorge de mystères. Cette petite île à deux heures de Ndangane, accessible uniquement par voie d'eau, abonde de lieux sacrés et de sites réputés pour leur valeur mystique. Le village lui-même serait un lieu sacré, comme l'indique le mot socé "diallang" pris pour désigner les lieux aux origines de sa création.
La déformation du terme aurait donné son nom à ce hameau reclus au milieu des eaux, baignant encore aujourd'hui dans un mysticisme très fort, fait de récits et de traditions ancestrales.
Dans ce village, existe un animal, le margouillat de Thiallane, un redoutable lézard, reptile dangereux, de par sa puissance mystique. Le village est pris d’assaut par des gens venus d’horizons divers avec comme objectif : se plaindre auprès de la famille Thior qui pratique le rituel du margouillat. Cette famille est la seule habilitée à toucher l’animal.
Le plaignant de vol qui arrive à Thiallane est conduit sous le grand baobab qui abrite le fer sur lequel doit être posé l’animal. Muni d’un marteau, le vieux Idrissa Thior en charge du rituel, repris par Le Soleil, évoque toutes les pratiques mystiques nécessaires avant de passer à l’acte. Les prières et les incantations.
Pour passer à l’action, il invite son hôte à s’accroupir comme lui à ses côtés. Tous les regards sont fixés sur le margouillat. Avant de brandir le marteau, le vieux consulte l’avis du plaignant. « Sur quelle partie du corps dois-je toucher ? », lui demande-t-il. La question est pleine de symbole. En effet, cette partie du jeu consiste à atteindre le voleur. Quand le vieux tape sur les pattes de l’animal, ce va se répercuter sur les membres du voleur (les mains ou les pieds). Quel que soit l’endroit où il se trouve. Juste après l’acte, le vieux pose le margouillat par terre.
A travers son déplacement, il véhicule un message. "Quand l’animal ne bouge pas et fait quelques pas et s’arrête, cela veut dire que celui qui t’a volé n’est pas loin de toi. C’est un voisin immédiat. Par contre, s’il court loin ou monte sur l’arbre un peu éloigné, c’est dire que le voleur est loin."
Le voleur qui est touché par la puissance mystique du margouillat est dans l’urgence de se purifier. Le purificateur utilise une matière mystique (riz écrasé mélangé à de l’eau). Il verse le produit sur les mains ou les pieds de la victime. Mais, c’est tout un tour de mysticisme. En général, la victime purifiée marche seule. Elle n’a pas besoin d’être aidée pour se déplacer. C’est comme un malade guéri. A signaler qu’en venant, la victime n’arrive pas à marcher. Mais après purification, elle peut se déplacer sans l’aide de quiconque.
La répercussion du rituel peut être détectée à travers ses caractéristiques : les mains sont gonflées avec une couleur noirâtre sur la peau. Ça ne se soigne ni à l’hôpital, ni ailleurs, seulement à Thiallane. Bien que les autres villages abritent le margouillat mais celui de Thiallane est spécial. Autrement dit, les margouillats de ces villages n’ont pas le même pouvoir que celui de Thiallane. Ici, c’est un animal sacré et intouchable. Du point de vue psychique, c’est le même animal. Cependant, ils n’ont pas les mêmes caractéristiques.