Les survivantes de viol et d'inceste et les 30 000 cas d'avortement par an

En 2024, 11% de la population carcérale sénégalaise concerne les faits d'avortement et d'infanticide.

Grossesse

En prélude de la Journée internationale pour le droit à lavortement le 28 septembre 2024, la FIDH, ses trois organisations membres au Sénégal (la LSDH, l’ONDH et la Raddho) et son partenaire l’AJS publient le rapport "Double peine : les survivantes de viol et d'inceste contraintes de poursuivre leur grossesse au Sénégal"...

Tout en apportant des témoignages de première main sur la réalité de la condition de l’accès à l’avortement, le rapport offre une analyse sociale et politique sur les raisons d’une situation particulièrement dure pour les femmes et les filles sénégalaises.

Le rapport analyse les obstacles à la légalisation de l’avortement médicalisé au Sénégal et fournit des recommandations pour que les autorités respectent leurs engagements en matière de droits des femmes.

Au Sénégal, il est interdit de mettre un terme à une grossesse même si elle est issue d’un viol. Chaque année, plus de 30 000 femmes et filles risquent leur vie et leur liberté en avortant clandestinement.

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« Les femmes ayant recours à un avortement encourent jusqu’à deux ans d’emprisonnement ainsi qu’une amende », rappelle Coumba Gueye, de l’Association des juristes sénégalaises (AJS).

« En 2024, 11% de la population carcérale concerne les faits d’avortement et d’infanticide. Il s’agit de la deuxième cause d’incarcération des femmes et des filles au Sénégal après le trafic de stupéfiants. Trouver des solutions incombe à tous les acteurs », révèle-t-elle.

  • Plus de 30 000 cas d’avortement par an

L’avortement clandestin est l’une des causes principales de décès maternels et la seule qui puisse être évitée. La direction de la santé de la mère et de l’enfant du ministère de la Santé et de l’Action sociale a déclaré avoir recensé plus de 30 000 avortements clandestins en 2020. Ces avortements, très risqués, car pratiqués en dehors des circuits médicaux, représentent la cinquième cause de décès maternels.

  •  224 femmes détenues dans 14 établissements pénitentiaires

Selon une étude menée entre septembre et octobre 2023, par le comité de plaidoyer pour l’accès à l’avortement médicalisé en cas de viol et d’inceste (Task force) avec l’appui de l’ONG Planned Parenthood Global (PPG), les résultats ont montré qu’au moment de l’étude, sur les 37 établissements pénitentiaires que compte le pays, seuls 14 établissements pénitentiaires abritaient des femmes incarcérées pour infanticide ou avortement clandestin.

Que sur les 244 femmes détenues dans l’ensemble de ces établissements pénitentiaires, 59 (24,18 %) ont été concernées par l’objet de l’étude. Parmi ces dernières, 54, soit 91,5 %, sont poursuivies pour infanticide et cinq, soit 8,5%, pour avortement clandestin.

En effet, les dernières enquêtes démographiques et de santé (2017 et 2019) révèlent que le taux de mariages d’enfants et d’adolescents est de 30.5%), le taux de grossesse précoce reste élevé et il estimé à 13, 8, la prévalence des infections sexuellement transmissibles est assez élevé avec 16, 5% chez les adolescents âgés entre 15-19ans et 29,3% chez les jeunes 20-24ans.

  • Le Sénégal ne respecte pas ses engagements

En 2004, l’État du Sénégal a ratifié le Protocole à la Charte africaine des droits de la femme en Afrique, dit Protocole de Maputo. Il reconnaît comme un droit fondamental l’accès à l’avortement médicalisé en cas de viol et d’inceste.

. Ces dispositions n’ont toujours pas été intégrées dans le droit interne. Fatou Bintou Thioune coordinatrice du programme égalité femme - homme de la Rencontre africaine pour la défense des droits de l’Homme (Raddho), déclare :

"L’État doit prendre les mesures nécessaires pour harmoniser certaines dispositions du protocole de Maputo avec le droit interne. Cela fait déjà 20 ans, on ne peut plus attendre. En signant ce protocole, le Sénégal en a pris l’engagement. Mais surtout, respecter ce protocole sauverait des vies et faciliterait la prise en charge de la santé sexuelle et reproductive des femmes et des filles sénégalaises."

10 ans après un précédent rapport sur le sujet, les associations signataires sont sans appel : la situation a empiré au Sénégal. L’État sénégalais est ambivalent sur la question des droits des femmes et soumis à l’influence néfaste d’acteurs parfois internationaux appartenant à la mouvance anti-droits, qui instrumentalisent la question de l’avortement médicalisé à des fins politiques.

Joseph Bagne Faye, juriste au sein de la Ligue sénégalaise des droits de l’Homme (LSDH) déclare : « Les défenseur·es des droits humains qui travaillent sur ce sujet sont menacé·es. Le Sénégal a le devoir de les protéger. À quand une loi de protection ? ».

Alice Mogwe, présidente de la FIDH ajoute : « le temps passe, les obligations internationales du Sénégal demeurent. En 2024, nous espérons que le renouveau politique permettra enfin le respect de l’état de droit et que le gouvernement mènera des actions concrètes pour les droits des femmes. Le Sénégal le doit aux petites filles et aux femmes du pays. Il s’y est engagé il y a 20 ans. »

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