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PJF : l’histoire secrète du chef du Parquet financier

Dans le cadre des réformes judiciaires en cours au Sénégal, plusieurs nominations clés ont été effectuées au sein de la magistrature, notamment au sein du Parquet financier. El Hadji Alioune Abdoulaye Sylla, précédemment Avocat général près la Cour suprême, a été désigné nouveau Procureur de la République financier, un poste stratégique dans la lutte contre la corruption et les crimes économiques

L'OBS dresse son portrait : "Souette austère et regard acéré, est le symbole judiciaire du moment. L’homme dont la plume fait vaciller les puissants. A la tête du Pool judiciaire financier depuis août 2024, il incarne la traque inflexible des crimes économiques". Abdoulaye Sylla est d’abord un homme hanté par une soif précoce de justice. Dès ses premiers pas dans les prétoires, il s’est imposé, témoigne, par une rigueur inébranlable, une ambition taillée dans l’ombre des figures judiciaires qui l’ont précédé.

A l'image du juge Yakham Lèye, un proche parent, dit-on, dont il a sans doute hérité bien des traits et du caractère. Là où d’autres auraient cédé aux pressions, lui a choisi la ligne droite, quitte à marcher seul. On raconte qu’il travaille tard, plongé dans des montagnes de dossiers, traquant la moindre faille, le plus infime indice. Son bureau est un champ de bataille de papiers annotés, de PV soulignés à l’encre nerveuse, où s’écrit, pièce par pièce, la chute de ceux qui se croyaient intouchables.

Un maniaque du détail

Abdoulaye Alioune Sylla a toujours montré ce qu’il a voulu être. Dès ses années de formation, on disait de lui qu’il avait l’obsession du détail, cette capacité rare à démêler les vérités maquillées. Rien ne lui échappe. Il écoute, observe, dissèque chaque nuance d’un témoignage, chaque silence lourd de sens. Sur le banc du parquet, il s’est vite distingué. Non pas par des éclats de voix ou des effets de manche, mais par cette manière de tendre un piège avec patience et méthode, jusqu’à refermer sur l’accusé une logique implacable, d’où il ne restait plus d’issue.

Un artisan du droit, méticuleux, redouté, inattaquable

Issu de la promotion 1997-1999 de l’Ecole nationale d’administration et de magistrature (Enam)

A Kaolack où il a fait ses premiers pas comme substitut du procureur de la République près le Tribunal régional, comme à Rufisque où il a été muté en tant que délégué du Procureur, il forge son style : rigoureux, méthodique, insensible aux pressions. Il affine son art de l’argumentation, défend ses réquisitoires avec la froide logique d’un juriste qui ne laisse rien au hasard. Mais c’est à Louga, où la hiérarchie lui a confié pour la première fois les lourdes responsabilités de procureur de la République, que son ascension prend une autre dimension.

Nommé chef du parquet, il se retrouve aux premières loges des grandes affaires. Des dossiers sensibles lui sont confiés, des noms lourds de pouvoir et des affaires très sensibles surgissent dans ses enquêtes. Là où d’autres temporisent, lui tranche. Là où certains détournent le regard, lui insiste, fouille, exhume des vérités dérangeantes. Mais c’est véritablement à Dakar, en tant que substitut du procureur au Tribunal de grande instance hors classe, que son nom commence, avec les comptes rendus d’audience de la presse, à illustrer les affaires judiciaires d’envergure. Toutefois, l’homme de terrain qu’il est reste attaché aux réalités du parquet. Il retourne ainsi dans les juridictions d’instance. Il est affecté à Ziguinchor.

pool judiciaire financier

En mai 2020, après avoir traversé les parquets régionaux et les juridictions d’appel, Abdoulaye Sylla franchit un nouveau cap, celui de la Cour d’Appel de Saint-Louis, où il prend la fonction d’avocat général. Puis, deux ans plus tard, il atteint les sommets de la hiérarchie judiciaire en intégrant la Cour suprême en tant qu’avocat général délégué. Mais c’est en août 2024 que son nom résonne à nouveau, cette fois avec une intensité nouvelle. Lors d’une réunion du Conseil supérieur de la magistrature, il est nommé procureur de la République financier près le Tribunal de grande instance hors classe de Dakar. Un moment charnière, dans un contexte où le Pool judiciaire financier (PJF), une force de frappe de 27 magistrats spécialisés dans la traque des crimes économiques et de la corruption, voit le jour.

Un taiseux, peu enclin aux mondanités

pool judicaire financier

Derrière son visage impassible et ses réquisitoires intransigeants, Abdoulaye Sylla est décrit par ses proches comme un homme réservé, un solitaire attaché à la discrétion imposée par sa fonction. Peu enclin aux mondanités, il préfère les cercles restreints où se croisent quelques confrères et amis de longue date. «Il n’est pas du genre à parler pour ne rien dire. Quand il s’exprime, c’est qu’il a pesé chaque mot. Il peut sembler froid, mais c’est surtout un homme qui place la responsabilité avant tout», confie un ancien collègue du parquet de Dakar. Sa carrière trace celle d’un magistrat qui a su gravir les échelons, pas à pas, grâce à son travail, sa rigueur et une compréhension acérée des rouages judiciaires.

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