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Fraude fiscale via le blanchiment d'argent : la CENTIF débusque 40 milliards FCFA

Dans son rapport d'activité 2023 publié sur son site, la CENTIF a constaté une persistance de la fraude dans les opérations financières des entités déclarantes, notamment les assujettis du secteur des banques et établissements financiers.
blanchiment
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La Cellule nationale de traitement des informations financières (CENTIF) du Sénégal a rendu public son rapport d’activités 2023. Le document présente les résultats de la lutte contre la fraude fiscale via le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme au cours de l’année écoulée.

Cette fraude se manifeste le plus souvent par des mécanismes de fraude aux coordonnées bancaires, l’hameçonnage2 , le vol des moyens de paiement, l’usurpation d’identité et les arnaques. Les profils des fraudeurs se révèlent diversifiés. Le dispositif intéresse de nombreux acteurs de la délinquance financière et notamment, au-delà de fraudeurs opportunistes agissant pour leur propre bénéfice, des réseaux de criminalité organisée.

En matière fiscale, la fraude concerne principalement des dossiers de dissimulation partielle de revenus tirés d’une activité professionnelle ou d’identification de flux et revenus dont l’origine ne peut être déterminée. Beaucoup d’entités créées recourent à des activités non déclarées à travers différentes réalités, soit une activité exercée de manière totalement occulte, soit une dissimulation partielle de chiffre d’affaires.

En outre, certaines entreprises exercent des activités avec des chiffres d’affaires de plusieurs milliards et sont inconnues des services fiscaux. Elle peut résulter d’une activité exercée à titre individuel (commerçant, prestation de services, autoentrepreneur) ou bien sous forme de société.

 Blanchiment de capitaux par le canal de la fraude fiscale

L’entreprise individuelle « MFashion » est titulaire d’un compte courant entreprise dans les livres de la banque « Barkel ». Le bénéficiaire effectif de ladite entreprise se trouve être Monsieur MATHIOU. Ainsi, un versement de 60 000 000 F CFA a été effectué dans l’une des agences de la banque en région, suivi le lendemain d’un retrait en espèce du même montant. Quelques jours après, un individu s’est présenté dans la même agence en vue de déposer une somme de 350 000 000 F CFA dans le compte susvisé.

Ainsi, au moment où le gestionnaire de compte interrogeait Monsieur MATHIOU au téléphone sur la licéité de l’origine des fonds, le client a désisté et est sorti de l’agence. Par ailleurs, dans le cadre de ses investigations, la CENTIF a saisi l’administration fiscale pour recueillir de plus amples informations sur les mis en cause.

A la suite de ses enquêtes, la CENTIF a découvert que l’entreprise individuelle est inconnue de l’administration fiscale autrement dit cette dernière n’a jamais procédé à une déclaration fiscale. En effet, les actes du mis en cause tombent sous les coups de la fraude fiscale. En conséquence, la CENTIF a transmis le dossier au Procureur de la République.

Sylo et le compte dans les livres d'une banque "SELL"

Sylo, titulaire d’un compte dans les livres d’une banque « SELL » est une entreprise individuelle évoluant dans la commercialisation de lait en poudre au Sénégal. Depuis son ouverture, le compte a été crédité d’un montant total 40 843 892 639 FCFA.

Les mouvements au crédit sont majoritairement des versements journaliers et des encaissements de chèques toujours tirés sur une même entité. Ces montants se situent dans la même fourchette (entre 1 000 000 FCFA à 592 700 000 FCFA).

Les mouvements au débit sont divers et constitués de retraits en espèces quotidiens, de remise de chèque et de virement. Le sieur « SYLO » a ouvert dans la même institution un compte au nom de sa femme Mme SYLO pour son usage personnel et pour effectuer d’importants versements en espèces et une mise en place d’un Dépôt à terme.

La dame est attachée de direction un service de l’état et a déclaré un revenu mensuel de 1 000 000 FCFA. Ledit compte a été crédité d’un montant total 3 513 669 210 FCFA. Les mouvements au crédit se font par des versements et des virements réguliers en provenance du compte de son mari. Ces montants se situent dans la même fourchette de 1 935 500 FCFA à 700 300 000 FCFA).

Interpellé sur l’origine des fonds et les motifs de l’ouverture du dernier compte au nom de sa femme, Monsieur SYLO déclare ne pas vouloir lier ces fonds à ses activités commerciales et menace de clôturer le compte.

Aucun justificatif n’a été produit nonobstant les multiples relances de l’institution. Des investigations recueillies auprès de la Direction Générale des Impôts et des domaines, il ressort que Monsieur SYLO est connu du Système Intégré de Gestion des Impôts et Taxes (SIGTAS) comme propriétaire de l’Entreprise individuelle du même nom. Il y souscrit ses déclarations sous le régime de la contribution globale unique (CGU4).

Cependant, selon la réglementation, cet impôt est déterminé à partir du chiffre d’affaires TTC et non en fonction du bénéfice qui tient compte des charges de l’entreprise, et concerne les entreprises personnes physiques dont le chiffre d’affaires annuel TTC ne dépasse pas 50 000 000 F CFA;

Or, le compte ouvert au nom du sieur DIALLO est exclusivement alimenté par des remises de chèques d’un montant cumulé de 40 843 892 639 FCFA entre 3 ans. En effet, l’impôt payé par le sieur SYLO est inférieur à celui réellement dû. Au terme des investigations, il a été relevé des indices graves et concordants de blanchiment de capitaux par le biais de la fraude fiscale ce qui a motivé une saisine de l’autorité judiciaire.

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